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    Évangéliser dans un esprit cicm

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    Jean Gracia ETIENNEPar Jozef Matton, cicm 

     

    Dans cet article, je veux partager quelques expériences qui ont suscité en moi quelques

    réflexions et questionnements.

    Ces expériences trouvent leur origine dans les évènements des derniers mois, des rencontres personnelles et des visites dans certaines Provinces de notre chère Congrégation.

    La COVID-19

    Nous avons tous vécu pendant plus de deux ans sous la crise sanitaire de la pandémie de COVID-19. Cette pandémie a eu et continue d’avoir un impact significatif sur chacun de nous. Partout dans le monde, de nombreuses mesures restrictives pour freiner la propagation du virus ont été prises afin que notre vivre ensemble dans la société soit aussi sain que possible. Dans nos communautés, surtout celles ayant des confrères âgés et affaiblis, les mesures restrictives ont été également prises. Il a fallu beaucoup de créativité et de flexibilité de la part des confrères et du personnel.

    Certaines mesures ou dispositions spécifiques, qui n’étaient que temporaires dans certaines communautés, restaient définitives, comme l’emplacement des tables dans le réfectoire, la façon dont les repas sont servis à table et le fait de prendre ses repas seul dans sa chambre.

    J’ai également constaté que certains confrères souhaitaient revenir à la situation d’avant COVID-19. Ils estimaient, en effet, que la vie communautaire en souffrait et que les moments de rencontre physique devenaient encore plus limités. Mais, beaucoup d’autres confrères voulaient garder le provisoire comme le permanent. Et pour quelle raison ? Est-ce parce que le provisoire leur convenait le mieux ? Il y a en effet un équilibre à chercher entre la santé physique de chaque confrère et une vie communautaire saine. Là encore, une certaine créativité et une certaine flexibilité s’imposent.

    La COVID-19 a fait découvrir aussi l’application de visioconférence ZOOM. Nous avons tous fait l’expérience que ZOOM peut être un moyen efficace pour des communications, pour des réunions, etc. Par exemple, les sessions de SEDOS (Service of Documentation and Study on Global Mission) par ZOOM ont eu un plus grand nombre de participants de partout dans le monde. Beaucoup de ces participants n’auraient pas pu venir si ces sessions étaient organisées (seulement) en présentiel à Rome à cause du coût de voyage ou encore du problème de visa.

    Mais en même temps, nous avons aussi pris conscience des limites de Zoom. Nous avons tous senti l’importance des rencontres physiques et personnelles. Nous devons chérir nos rencontres personnelles et physiques non pas seulement en Europe, mais probablement ailleurs aussi. Nous avons tous appris comment le confinement a été une expérience pénible et dure pour beaucoup de gens. Heureusement, nous religieux, nous avons une communauté. Nous devons en prendre soin.

    La COVID-19 a eu d’importantes répercussions sur notre Congrégation. Il y a d’abord des confrères qui sont directement ou indirectement décédés de la COVID-19, même dans des pays où l’on prétendait que la COVID-19 n’existait pas.

    Ensuite, la pandémie de COVID-19, avec toutes ses restrictions, a fait que pendant plus d’une année, les membres du Gouvernement général n’ont pas pu voyager pour visiter les confrères dans plusieurs Provinces et pays où CICM est présente.

    Enfin, plusieurs jeunes confrères ont aussi fait une expérience dure. Certains, par exemple, ont dû attendre deux ans avant de pouvoir entrer dans leurs pays de mission. D’autres ne sont même pas parvenus à joindre les pays où ils étaient nommés comme missionnaires. Pour ces derniers, les nominations missionnaires ont été même changées. Cela exigeait beaucoup de patience et d’efforts d’adaptation aux nouvelles réalités. La patience et la créativité ont été nécessaires pour affronter ces nouvelles réalités. Avoir un esprit et une conviction missionnaire a beaucoup aidé dans ce processus d’adaptation. Cette expérience aidera peut-être dans l’avenir quand d’autres défis et difficultés se présenteront et nécessiteront une adaptation. Chers confrères, ne reculons pas devant les défis. Ce n’est pas missionnaire. Ce n’est pas CICM non plus.

    En plus de la pandémie de COVID-19, l’Europe fait face à une autre crise. Avec l’invasion de l’Ukraine par la Russie, l’Europe s’est rendu compte que le rêve d’une paix permanente en son sein était une utopie. Quelle horreur en Ukraine ! Des milliers de morts et de blessés des deux côtés ! Aucun appel à la paix n’a été entendu. Quel est le rôle des Églises qui se réclament de chrétiennes ? La religion devrait unir et construire et non pas séparer et détruire. Quel avenir pour l’œcuménisme ?

    Durant ce temps de guerre en Ukraine, nous assistons à des réactions contradictoires en Europe. D’un côté, l’Union européenne réagit en envoyant des armes soi-disant « pour se protéger ». De l’autre côté, elle manifeste une grande solidarité avec le peuple ukrainien. Soudain, de grosses sommes d’argent sont disponibles pour l’aide humanitaire et l’accueil des réfugiés. À la suite de cette attitude de l’Union européenne, d’aucuns se demandent pourquoi une si grande solidarité avec le peuple ukrainien et un quasi-refus d’accueillir les réfugiés syriens et ceux qui viennent d’autres pays ?

    Chacun peut collaborer à la construction

    d’un monde plus pacifique:

    à partir de son propre cœur

    et des relations au sein de la famille,

    dans la société et avec l’environnement,

    jusqu’aux relations

    entre les peuples et entre les États.

     

    Pape François, Message pour la célébration

    de la LVe journée mondiale de la paix. 1er janvier 2022

    Vivre des difficultés

    Au début de cette année, on a découvert que mon cousin avait une tumeur au cerveau. Les médecins lui ont dit clairement qu’il n’avait que six mois à un an à vivre encore, dépendant de la vitesse du développement de la tumeur et de l’efficacité de la chimiothérapie.

    Lorsque je l’ai visité, j’ai été énormément frappé par la sérénité avec laquelle lui et sa femme vivent cette réalité pénible. Je les en ai félicités tout en exprimant mon émerveillement pour la façon dont ils parviennent à vivre cette expérience douloureuse. Après s’être regardé avec sa femme, mon cousin me répondait : « Est-ce que m’énerver ou me rebeller ou bien me laisser aller changerait quelque chose ? Cela ne me ferait pas vivre plus longtemps ni encore moins me guérir. Mais nous devons tous les deux affronter ces moments pénibles. C’est le soutien et l’encouragement mutuel qui nous aident. Nous sommes mariés non seulement pour les beaux moments, mais aussi pour les moments pénibles. » 

    En rentrant, j’étais très pensif. Je pensais surtout à des situations difficiles que beaucoup de confrères vivent parfois. Je pensais aussi à mes rencontres avec des confrères qui recevaient de mauvaises nouvelles concernant leur santé. Je me suis aussi posé la question de savoir comment je réagirais moi-même dans une telle situation.

    Et nous CICM, sommes-nous vraiment frères et confrères les uns pour les autres ? Parvenons-nous à nous soutenir les uns les autres dans un esprit de

    Cor Unum et Anima Una quand nous traversons des moments difficiles ? Notre Cor Unum et Anima Una n’est pas seulement un slogan à imprimer sur des T-shirts, mais une mission à vivre.

    En vue du16e Chapitre général

    L’Assemblée provinciale de la Province CICM de LAC (Latin America and the Caribbean) à laquelle j’ai participé avait pour thème : Les disciples furent remplis de joie en voyant le Seigneur (Jn 20, 20). Le logo pour cette Assemblée reflétait très bien ce thème. Et c’est avec beaucoup de satisfaction que j’ai pu constater que beaucoup de confrères jeunes et moins jeunes, travaillant dans les différents pays de la Province, sont des missionnaires pleins de joie. Tout en étant réalistes et conscients des défis à relever dans chaque pays, il reconnaissent également qu’une conversion permanente est nécessaire pour chaque membre de la Province de LAC.

    Je voudrais terminer avec quelques mots concernant les mémos en préparation du 16e Chapitre. J’ai entendu quelques commentaires et remarques concernant les trois mémos que le Gouvernement général avait envoyés dans toutes les Provinces CICM afin de faciliter la préparation du 16e Chapitre général.

    Une des remarques était que « les mémos ont une orientation trop ad intra. C’est à peine qu’on voie quelque chose concernant notre “core business,” à savoir la mission. Quelle présence missionnaire aujourd’hui et dans le monde d’aujourd’hui ? » Certainement, ces questions ne sont pas explicitement posées dans les trois mémos. Cependant, je crois, personnellement, qu’il faut lire ces mémos avec la lumière du thème de notre 16e Chapitre général, à savoir, « témoigner de l’Évangile dans un monde en mutation. » Pour moi, le verbe « témoigner» a toute son importance. Il constitue la clé de lecture de tous les trois mémos.

    L’homme contemporain

    écoute plus volontiers

    les témoins que les maîtres

    ou, s’il écoute les maîtres,

    c’est parce qu’ils sont des témoins.

    Paul VI, Evangelii Nuntiandi, no. 41

    Nous sommes tous convaincus et nous le disons avec beaucoup de conviction que le témoignage de vie est l’élément le plus important dans notre vie et dans notre travail missionnaire. J’en suis aussi profondément convaincu.

    Certes, des questions telles que « quel travail missionnaire ? » et « à quel endroit ? » sont des questions importantes. Mais si nous n’avons pas les dispositions missionnaires nécessaires, si nous ne sommes pas vrais dans notre vie missionnaire et religieuse, si nous menons une double vie, quel témoignage pourrions-nous donner, quel que soit l’endroit où nous sommes ?

    Nous devons plutôt oser nous poser les questions suivantes : est-ce qu’évangéliser dans un esprit CICM est encore notre joie ? Sommes-nous là pour la mission ou est-ce que la mission est là pour notre propre profit ? Sommes-nous prêts à nous réconcilier, nous CICM, à plusieurs niveaux de la vie ? Quel témoignage missionnaire donnent deux confrères vivant dans une même communauté sans se parler ? Sommes-nous prêts à vivre et à nous engager dans un contexte interculturel témoignant de l’universalité du salut ? Quels sont nos critères de choix lorsque nous sommes consultés en vue des nominations au sein de notre Province ?

    Je suis convaincu que pour cela il nous faut aussi un renouveau spirituel. De belles structures et beaucoup d’argent ne suffisent pas. Il y a de très grands défis ad intra dans notre Congrégation.

    Honnêtement, il est très douloureux de voir que pour certains confrères, l’ambition personnelle, l’enrichissement personnel, le pouvoir et l’influence sont parfois plus importants que nos engagements communautaires pour la mission et pour une plus grande solidarité congrégationnelle. Nos trois vœux religieux risquent de perdre toute leur valeur et leur inspiration religieuse.

    Pendant l’Assemblée provinciale de la Province de LAC, un jeune confrère me posait, un peu à ma surprise, la question de savoir si j’avais encore l’espoir pour l’avenir de la Congrégation. Certainement ! Pourquoi en douter ? Cependant, l’avenir de la Congrégation ne dépendra pas seulement des Supérieurs à tous les niveaux de la Congrégation, mais aussi de chacun de nous. Chacun de nous a sa responsabilité malgré nos faiblesses. De belles structures et des moyens financiers ne sont que secondaires.

    Je vous souhaite tous un engagement missionnaire enthousiaste. Priez pour la réussite du prochain Chapitre général de notre Congrégation. Nous sommes tous « participants. » Cor unum et Anima una.