Contact Us  |  

    Des Régions et Provinces

    Créé à l’image de Dieu

    Etoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactivesEtoiles inactives
     

    Atkin Timothy Ongoing FormationPar Charles Ilunga, cicm

     

    « J’espère qu’à la fin de votre année sabbatique, vous allez écrire un article », me disait Raphaël Mukendi, notre Secrétaire général, lors de ma première rencontre avec lui, un dimanche au Collegio. Je lui ai donné un oui évasif comme je ne l’avais pas encore entamée : oui on verra !

    « Renouvelez-vous et revêtez l’homme nouveau créé selon Dieu dans la justice et la sainteté qui viennent de la vérité » (Ep 4,23 — 24).

    Plusieurs facteurs peuvent nous convaincre de nous décider un jour de prendre une année sabbatique. Pour ma part, c’est la conviction d’avoir terminé une tâche qui m’était confiée en un endroit bien déterminé. Ainsi, il me fallait partir de là pour me renouveler physiquement, intellectuellement et spirituellement.

    Le début n’est pas facile, et toute rupture avec le passé est douloureuse. Il est donc difficile de laisser derrière soi son passé, pour se lancer dans une nouvelle aventure, et l’incertitude fait peur. Après que les Israélites soient sortis d’Égypte, ils continuaient à se rappeler des marmites de viande, des oignons et du pain à satiété, malgré l’oppression qu’ils avaient subie en Égypte (Ex 16,3).

    L’expérience prouve qu’il faut souvent du courage et une grande détermination pour rompre avec le passé, afin de renaître à une nouvelle vie. En fait, je me laissais avaler par un activisme forcené. Je considère donc cette année sabbatique comme une invitation du Seigneur au désert pour me dépasser et me purifier.

    Mon année sabbatique a gravité autour de quatre axes : les cours, la vie spirituelle, le repos et la découverte de la cité éternelle (lier l’utile à l’agréable). Je vais surtout écrire sur les deux premiers points.

    Durant mon année sabbatique, j’ai habité la communauté des Pères Comboniens, située sur Via San Pancrazio 17b, à Rome. Ainsi, j’étais tout près de la Faculté Pontificale de Théologie Spirituelle Teresianum, dirigé par les Pères Carmes Déchaux. Pour l’année académique 2016-2017, je me suis inscrit comme auditeur libre et j’ai suivi quelques cours en Anthropologie Chrétienne.

    Ce thème « Homme, créé à l’image de Dieu » m’a fortement fasciné, au point que je me suis décidé d’écrire cet article. En effet, l’anthropologie chrétienne est fondamentalement une anthropologie où l’homme est voulu pour lui-même, et où chaque être humain est capable de vivre de l’amour, en raison même de son origine. Le dernier jour de la création, Dieu dit d’un ton solennel « Faisons l’homme à notre image, à notre ressemblance ! » (Gn 1,26), comme couronnement de sa création.

    1. La vie intellectuelle

    Beaucoup de penseurs ont écrit de belles pages et développé des réflexions sur ce thème « image de Dieu », selon plusieurs perspectives : philosophique, théologique, exégétique, etc. La matrice biblique exprimée en Gn 1,2 n’a cessé, depuis des siècles jusqu’à nos jours, d’être le point de départ la réflexion anthropologique chrétienne, puisque la dignité de la personne humaine s’enracine dans sa création à l’image et à la ressemblance de Dieu.

    Je laisserai de côté le débat et la spéculation théologique sur ce thème, pour parler de l’image de Dieu dans sa vision relationnelle. En effet, le terme « image » désigne un rapport et exprime une relation. L’homme, créature douée d’intelligence et de volonté, est la première des créatures et le plus proche de Dieu en vertu de cette image qui suppose, par définition, la proximité immédiate de Dieu, comme terme de la relation de ressemblance qu’implique toute image.

    De toutes les créatures visibles, seul l’homme est capable de connaître et d’aimer son Créateur. Il est la seule créature sur la terre que Dieu a voulue pour elle-même ; lui seul est appelé à partager la vie de Dieu, par la connaissance et l’amour. Il a été créé à cette fin, et c’est là la raison fondamentale de sa dignité. Même si les approches traditionnelles de l’image de Dieu présentent des avantages, elles présentent aussi l’inconvénient de ne pas relever assez le fait que l’être humain se définit par rapport à Dieu, dans une relation de communion.

    En Dieu lui-même, en proclamant : « Faisons l’homme à notre image, à notre ressemblance », nous trouvons la notion de relation et de communion. Créée à l’image de Dieu, l’humanité existe en relation avec Dieu, le Dieu Trinitaire. Dieu n’est pas seul, solitude, ou monolithique. Il est trois : le Père, le Fils et le Saint-Esprit. Il est famille et communion. La Trinité divine est une expression d’une relation dans l’altérité. Être créé à l’image de Dieu peut donc être conçu comme une dynamique personnelle, ainsi les êtres humains sont appelés à représenter Dieu dans la création. Cette représentation devrait aussi bien être perçue dans les relations humaines.

    Comme nous venons de le dire, le Dieu Unique que révèle la Bible est constitué de trois Personnes distinctes, toutes les trois également divines : le Père, le Fils et le Saint-Esprit ; une seule essence, un seul Dieu. L’image et la ressemblance de Dieu en l’homme doivent donc, d’une certaine manière, refléter ce caractère trinitaire du seul vrai Dieu. C’est pour cela que Dieu se décline lui-même au pluriel lorsqu’il crée l’homme, en disant : « Faisons l’homme à notre image, selon notre ressemblance. »

    La nature de Dieu étant communautaire, l’homme n’est donc pas un atome individuel ; il est doté ontologiquement d’une nature communautaire, et vient d’une famille, d’un clan, tribu, nation et humanité. Il en est de même pour l’homme régénéré, qui ne peut être conçu séparé du Corps du Christ. L’idée d’un homme isolé comme un atome solitaire est donc une pure absurdité. Tous ceux qui sont issus d’Adam comme image et ressemblance de Dieu, sont donc image Trinitaire, chacun pour son propre compte, et cela dès sa conception jusqu’à sa mort.

    Dans la ligne de cette redécouverte de la profondeur du thème de l’image de Dieu (imago Dei) depuis le Concile Vatican II, la Commission théologique internationale réaffirme la vérité du fait que les personnes humaines sont créées à l’image de Dieu, afin de jouir de la communion personnelle avec le Père, le Fils et le Saint-Esprit, et de la communion personnelle entre elles, et afin d’exercer, au nom de Dieu, une intendance responsable du monde créé. À la lumière de cette vérité, le monde n’apparaît pas comme une réalité simplement très étendue et vide de sens, mais comme un lieu créé pour la communion personnelle et fraternelle.

    Par son péché, l’homme a perdu « sa ressemblance » avec Dieu, mais Dieu ne va pas l’abandonner, tout son dessein salvifique consistera dès lors à redonner la « ressemblance » à sa créature pécheresse (Lc 15,4-6).

    La plupart de nous connaissent ce chant « Que tes œuvres sont belles, que tes œuvres sont grandes… Tout homme est une histoire sacrée, l’homme est à l’image de Dieu. » Cette réflexion sur l’image de Dieu, dans sa dimension relationnelle, nous conduit à nous laisser interpeller sur l’image de Dieu dans nos communautés. L’image de Dieu projette une lumière sur notre vie de communion fraternelle (Constitutions CICM, Art. 48, 49 et 50) et suscite la conversion pour devenir, malgré nos limites humaines, la communion de la Sainte Trinité. La relation d’amour qui passe entre ces trois Personnes divines serait un chemin pour bâtir des communautés où mon confrère est créé à l’image de Dieu.

    Le Pape François a suggéré un « moyen concret » pour « manifester » la Résurrection, c’est-à-dire à travers la « la vie fraternelle en communauté. » En fait, dit le Pape : « Il s’agit d’accueillir les frères que le Seigneur nous donne : pas ceux que nous choisissons, ceux que le Seigneur nous donne. Depuis que le Christ est ressuscité, il ne nous est plus permis, comme le dit l’apôtre Paul, de regarder les autres de façon humaine (cf. 2 Co 5,16). Nous les voyons et nous les accueillons comme un don du Seigneur. L’autre est un don qui ne peut être ni manipulé ni méprisé ; un don à accueillir avec respect, car en lui, surtout s’il est faible et fragile, le Christ vient à ma rencontre […]. Dans une société qui tend à niveler et à massifier, où l’injustice oppose et divise, dans un monde déchiré et agressif, ne faites pas manquer le témoignage de la vie fraternelle en communauté » (Pape François, Message du 24 juin 2017). Cela est possible par la relation d’amour qui passe entre les trois Personnes divines.

    Seigneur, fais de nos communautés et nos relations un vrai miroir de la Sainte Trinité.

    2. La vie spirituelle

    En choisissant de prendre quelques cours à la Faculté Pontificale de Théologie Spirituelle, Teresianum, j’ai découvert la spiritualité carmélitaine. L’axe principal qui fonde la spiritualité carmélitaine est l’oraison. Elle est une forme de prière silencieuse, présentée comme un temps consacré à s’éveiller à la présence de Dieu qui habite en l’homme, au plus intime de son cœur.

    La vocation de l’homme la plus profonde c’est de rejoindre cette présence au fond de lui. Et l’oraison est ce chemin de l’homme pour rejoindre Dieu qui est là présent au fond de lui et qui l’attend. Karl Rahner affirmait que : « le chrétien du futur sera un mystique ou ne sera pas chrétien. »

    Deux Docteurs mystiques, Sainte Thérèse d’Avila et Saint Jean de la Croix nous tracent un itinéraire à suivre pour arriver à cette union avec Dieu. Dans son livre « Château intérieur », Sainte-Thérèse offre un itinéraire spirituel en sept demeures pour ceux qui désirent s’approcher de Dieu et de Jésus Christ. Tandis que, Saint-Jean de la Croix, dans « La montée du Carmel », décrit les différentes étapes pour arriver à l’union avec Dieu, en se focalisant sur l’oraison et l’exercice des vertus théologales. Pour parvenir à l’union avec Dieu, Jean de la Croix montre qu’il y a beaucoup de choses incompatibles entre l’homme et Dieu. Ainsi, l’homme doit passer par un chemin de purification pour se séparer de tout ce qui est incompatible avec la volonté de Dieu. La vocation à l’union est la clé du rapport entre l’homme et Dieu, et ce fil rouge a été d’une grande inspiration dans la vie de Sainte Thérèse de Lisieux, Sainte Élisabeth de la Trinité et Sainte ThérèseBénédicte de la Croix (Edith Stein). Cette union à Dieu est un des thèmes fondamentaux de la théologie spirituelle. Le Père Carlo Laudazi, OCD, a écrit un livre dont le titre est L’uomo chiamato all’unione con Dio in Cristo (L’homme appelé à l’union avec Dieu dans le Christ). Toute vie spirituelle est fondée sur la conviction que l’homme est invité à répondre à l’amour de Dieu. La vie spirituelle est une vie qui s’unifie dans l’accueil de l’Esprit de Dieu, même si elle peut se révéler difficile.

    La lecture de la vie des Saints nous montre qu’ils ont été des chercheurs de Dieu, des témoins inlassables de Dieu, chercheurs de sa présence et son action dans leur vie. Ils ont cheminé sur les voies de la contemplation : cette soif de voir Dieu, de le chercher et d’être en conversation avec Lui. C’est cette ouverture à Dieu qui a donné sens et saveur à leur vie.

    La contemplation de Dieu transforme la personne, en la faisant devenir l’image de Dieu. Sainte Elisabeth de la Trinité disait : « Les saints Le connaissent comme ils sont connus de Lui, c’est-à-dire par une vision intuitive. C’est pourquoi ils sont transformés de clarté en clarté, par la puissance de son Esprit, en sa propre image. » Cette ressemblance à Dieu permet d’être la manifestation de la gloire de Dieu. Le but de la vie spirituelle est la vision de Dieu.

    « Le missionnaire, s’il n’est pas un contemplatif, ne peut annoncer le Christ d’une manière crédible ; il est témoin de l’expérience de Dieu et doit pouvoir dire comme les Apôtres : “Ce que nous avons contemplé…, le Verbe de vie…, nous vous l’annonçons” (1 Jn 1,1-3) ; (Redemptoris Missio, n.91). ■