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    Pourquoi avons-nous tendance à « oublier » les Frères ?

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    Atkin Timothy Ongoing FormationPar Jonel B. Dalimag, cicm


    Introduction

    Cette question a été posée il y a de nombreuses années et elle se pose encore aujourd’hui. En 1997, le Gouvernement général a demandé à Euntes d’étudier la question des Frères en CICM. La question de « comment » n’était pas celle qui avait orienté l’étude. Celle-ci était plutôt orientée par la question « pourquoi ». Le Centre de Formation permanente d’Euntes a publié un mémo intitulé LES FRÈRES EN CICM : PENSER À L’AVENIR1 en 1998. À la suite de cette étude, le 12e Chapitre général CICM a adopté quatre recommandations en 1999.2 Où en sommes-nous avec toutes ces recommandations ? Pourquoi avons-nous tendance à oublier les frères ? Le 15e Chapitre général a exprimé en 2017 le souhait, et non pas une recommandation, de revoir la question des Frères après une longue pause de 18 ans. Ce souhait a ouvert la voie à l’organisation de la première Assemblée générale des Frères CICM.

    Première Assemblée des Frères CICM

    Du 14 au 20 août 2022, sept Frères CICM se sont réunis au Centro Ad Gentes à Nemi (Rome) pour discuter de leur vocation de missionnaires religieux. Il s’agit de Louis Lokumu (KIN), Wilfried Meulemeester (BNL), Robert Dixon (US), Agustin Beya (AFA), Hector Guazon (RP), Niel Arca (RP), et Jonel Dalimag (RP). L’Assemblée a été organisée et facilitée par la Commission générale pour la Mission (CGM). Selon l’Elenchus de 2022, il n’y a que 28 Frères dans la Congrégation. Ce qui représente 3,6 % du total des membres. Seuls sept des 28 Frères CICM ont participé à l’Assemblée afin de réfléchir à leur identité, leur vocation et leur mission. Ils ont parcouru l’histoire et les documents de la Congrégation pour nourrir leurs réflexions.

    Théophile Verbist et les Frères CICM

    Durant l’assemblée, les « Sept Magnifiques », comme les appelait le Père Adorable Castillo, Président de la CGM et notre Vicaire général, se sont penchés sur l’histoire de la vocation des Frères dans la CICM. Ils ont été inspirés par un livret intitulé « Let the Brothers speak»3, qui résume l’histoire de la vocation des Frères au sein de la CICM depuis sa fondation. L’histoire CICM démontre explicitement que « Théophile Verbist, notre fondateur et ses premiers compagnons ont reconnu dès le début de la Congrégation le rôle essentiel que des frères laïcs pourraient avoir dans l’entreprise missionnaire. »4 Verbist n’envisageait pas une Congrégation réservée aux clercs. Son intention initiale d’aller en Chine pour s’occuper des enfants abandonnés définit clairement sa vision d’établir une Congrégation missionnaire dédiée au service de l’humanité. La vision missionnaire du Fondateur, comme elle est exprimée dans ses nombreuses lettres, ouvre la porte de la CICM aux membres non ordonnés :

    « Il est frappant de lire dans les lettres de Théophile Verbist combien il désirait avoir des Frères…, c’est-à-dire des Frères ayant une vocation véritable et une solide formation religieuse. Notre Fondateur pensait que les Frères pouvaient rendre des services inestimables pour l’organisation matérielle et la vie de la mission. » 5

    La spiritualité du Fondateur est fondée sur son sens aigu de l’humanité :

    « Théophile Verbist n’a pas fait de « grandes choses ». Il n’a pas construit de magnifiques bâtiments, créé de puissantes institutions, écrit un livre ou un traité sur la mission. Il a écrit de simples lettres d’amitié et d’encouragement. Il n’a passé que 27 mois en mission à l’étranger et il est mort jeune. Il a tout simplement répondu à l’appel de la mission, à l’appel de l’humanité fondamentale. Il s’est occupé des enfants abandonnés et a essayé de subvenir aux besoins des gens qui l’entouraient. De simples actes de solidarité et de bonté humaine. Ceci constitue une inspiration pour nous. L’avenir de la Congrégation dépend de notre réponse particulière à cet appel fondamental de l’humanité. »6

    Cette réflexion sur la personnalité et la spiritualité du Fondateur a donné le ton au reste des échanges et des discussions de l’Assemblée.

    Le Frère CICM: Identité et Mission, un voyage de l’intérieur

    Les objectifs et les attentes de l’Assemblée étaient grands : revitaliser les vocations à la vie religieuse des Frères en CICM ; formuler et recommander des orientations et des principes généraux pour revitaliser la vocation à la vie religieuse des Frères et présenter des propositions et des recommandations au 16e Chapitre général de notre Congrégation (2023). Cependant, il faut noter que l’Assemblée des Frères CICM n’a pas été organisée en vue du 16e Chapitre général.

    Pour répondre aux attentes et aux objectifs fixés, les « 7 Magnifiques » ont entrepris un cheminement intérieur, guidés par l’histoire des Frères dans la CICM. Le partage et les réflexions étaient basés sur des expériences personnelles du vécu des Frères CICM. L’identité commune d’un Frère CICM, telle qu’elle a été établie depuis longtemps, a émergé de ce partage et de cette réflexion :

    « Le Frère CICM est avant tout un disciple baptisé de Jésus-Christ. Il considère son baptême comme un ministère pour continuer la mission de Jésus-Christ dans le monde. En tant que religieux, il a opté pour un modèle radical de disciple pour la mission. Il retourne de manière critique aux racines de la foi chrétienne et est conscient du fait qu’il est appelé à suivre le Seigneur de très près. Sa fidélité à cet appel est vécue à travers l’observance des trois vœux. »7

    En d’autres termes, le Frère CICM est un missionnaire religieux à part entière. Il n’est pas un simple assistant du prêtre, il n’est pas un missionnaire de second ordre et, surtout, il n’est pas quelqu’un qui n’a pas rempli les conditions requises pour le sacerdoce. L’identité d’un Frère CICM ne dépend pas de l’identité d’un prêtre religieux. En CICM, nous sommes tous des missionnaires religieux. Si nous cheminons tous ensemble de l’intérieur et dans l’esprit originel de notre Congrégation, nous découvrirons que nous sommes tous frères dans le même charisme avec une vocation et une mission commune ! Être CICM exige une compréhension approfondie de notre identité commune :

    « Nous devrions revenir à l’essentiel et réfléchir sérieusement sur notre identité de missionnaires religieux. Il ne sera pas facile d’amorcer un tel processus de conscientisation… Par conséquent, le processus de conscientisation devrait se concentrer sur notre identité missionnaire et religieuse commune – à ne pas assimiler à l’identité sacerdotale. Avec un peu de chance, nous réaliserons un jour que nous sommes tous frères et des missionnaires tout court. » 8

    Défis à relever

    La mentalité cléricale est très répandue dans la Congrégation. Il sera difficile de la changer. Cela est dû au fait que le cléricalisme est profondément ancré dans notre façon de faire. Le programme de formation dans la Congrégation est orienté vers la prêtrise. L’élément de formation missionnaire est absent de ce programme de formation dans la Congrégation. L’esprit de la formation missionnaire pénètre les activités au sein du séminaire, comme les apostolats de fin de semaine et les immersions, ainsi que le contenu du programme d’études théologiques. Cela donne l’impression que la prêtrise est le but premier de la formation au sein de la CICM. Ainsi, lorsque quelqu’un exprime son intérêt à devenir un Frère missionnaire, les responsables de la formation ne savent plus quoi faire. En conséquence, la formation d’un Candidat-Frère est très improvisée. Ou bien le Candidat suit tout simplement la formation qui mène à l’ordination. Pire encore, les confrères découragent un Candidat-Frère de poursuivre la vocation de frère et l’encouragent plutôt à poursuivre celle qui conduit à la prêtrise. C’est ce qui était ressorti très clairement de la discussion de l’Assemblée.

    Le problème du cléricalisme ancré ne se limite pas aux programmes de formation. Le problème est encore pire en mission. Les Frères CICM n’ont pas leur place dans nos Provinces où notre présence missionnaire est majoritairement dans les paroisses avec un accent sur les sacrements et dans les ministères ad intra. Dans nos Provinces, les Frères CICM doivent se frayer un chemin, parfois sans le soutien de la Province. Cependant, les Frères ont du mal à trouver leur propre chemin et à être des missionnaires efficaces parce que leur formation, qui est de nature cléricale, ne leur fournit pas les outils nécessaires. La formation professionnelle des Frères CICM est nécessaire ! C’est l’une des recommandations fortes du 12e Chapitre général CICM. Chaque année, les Provinces CICM et même le Gouvernement général envoient des confrères pour des études spécialisées (soi-disant pour répondre aux besoins de la mission). Cependant, la formation professionnelle ou la formation des Frères CICM n’a pas été suffisamment considérée. Encore une fois, les Frères CICM doivent essayer de tracer leur propre chemin pour devenir utiles à la Congrégation. Y a-t-il un espoir pour les Frères CICM dans la Congrégation ?

    Si nous considérons nos documents et si nous creusons plus profondément dans l’esprit de notre identité et de notre mission, la réponse à cette question est un OUI retentissant. Nos Directives générales pour la Mission indiquent clairement les critères de notre présence missionnaire ainsi que les attitudes missionnaires requises pour nos engagements. Elles indiquent aussi un chemin clair pour les ministères missionnaires des Frères CICM. Rien dans les Directives générales pour la Mission n’indique que nous devrions être dans les paroisses et ne faire que du travail pastoral et sacramentel. Les Directives disent simplement que comme missionnaires, nous devons répondre aux besoins missionnaires de l’endroit où nous sommes envoyés ; que nous devons être des missionnaires de la rencontre et du dialogue et que nous devons être pionniers et solidaires avec les gens. Si nos Provinces et nos communautés croient honnêtement à ces Directives, il y a de bonnes chances et un espoir que la vocation et la mission des Frères CICM soient revitalisées. Ce qui, à son tour, restaurera toute la Congrégation.  

     

    J’ai été toujours d’avis
    qu’il fallait
    des frères religieux.
    9

     

    Pictrure D1

    ___________

    1. EUNTES, Centre de Formation permanente, Memo 4 : Frères CICM, penser à l’avenir, 10/11 -GG/Euntes (Kessel-Lo, août 1998). Pour une meilleure appréciation et compréhension des résultats de la récente Assemblée générale des Frères CICM, il est recommandé que ce document soit republié par Chronica pour être mis à la disposition de tous les confrères.

    2. Mission en situations frontières, Actes du 12e Chapitre général (Rome, 1999), pp. 30-31.

    3. Let the Brothers Speak est un document compilé par Jonel DALIMAG qui a servi d’instrumentum laboris de l’Assemblée. Il est recommandé que ce document soit également mis à la disposition de tous les confrères.

    4. Van Den Berg, Leo, “Les Frères CICM” dans Chronica, 66 (1996)7, pp. 257-260.

    5. Nestor Pycke, “CICM : Foundation, Charism, Venture and Spirit,” dans A Passion for Mission, 150 years of CICM, pp. 4-37.

    6. Adorable Castillo, 5 août 2022 (Centro Ad Gentes, Nemi). a animé la première journée de l’Assemblée qui a été programmée comme une récollection. Il a axé sa réflexion sur la spiritualité missionnaire CICM.

    7. Ibid., p. 19.

    8. Brothers in CICM: Thinking Ahead, 1998, pp. 21-22.

    9. Lettre 269. Voir Verhelst Daniels and Hyacint Daniels, La Congregation du Cœur Immacule de Marie (Scheut), édition critique des sources, Tome II A, La Correspondence de Théophile Verbist et ses Companions 1865-1866 (Presses Universitaires de Louvain, 2003), p. 8.