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    "Affermis tes frères" (Lc 22, 32)

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    Jos DasPar Jos Das, cicm

    Dans ma lettre de fin d’année, adressée à ma famille, bienfaiteurs et connaissances, j’avais écrit : « Je ne construis pas des églises, ni des écoles, je ne travaille pas pour un projet de développement, mais je travaille à la formation de l’homme ». Une religieuse a réagi à ces paroles et elle m’a félicité pour cette façon d’être missionnaire. D’autre part, je suis reconnaissant envers mes prédécesseurs qui ont construit ce beau Centre qui me permet d’être missionnaire dans le domaine de la formation permanente et de l’animation.

    Ca fait 14 ans que le CTV-Mbudi, Centre Théophile Verbist a ouvert ses portes. C’est notre confrère, Feu le cardinal Frédéric Etsou qui l’a béni le 3 janvier 1998, fête de l’Epiphanie, fête éminemment missionnaire. Depuis l’ouverture, les équipes dirigeantes qui se sont succédé, ont élaboré progressivement un programme d’activités. Au début c’était principalement des retraites, mais en se limitant à ces activités, le Centre se trouvait la plupart du temps vide, et financièrement déficitaire. Les circonstances contraignantes ont obligé les responsables à réfléchir, comment le Centre pouvait jouer pleinement son rôle d’animation et de formation dans un esprit missionnaire et selon notre charisme cicm.

    Actuellement, l’équipe organise des retraites, surtout pendant les mois de juillet, août et septembre, dont plusieurs sont animées par des confrères cicm. Pendant d’autres périodes de l’année, nous présentons des sessions d’une semaine sur un thème suggéré par des religieux et religieuses, comme e.a. « L’ennéagramme spirituel », « Maturité affective et humaine dans notre ministère », « L’exercice du leadership religieux » ; « La gestion des émotions »,« L’expérience du milieu de la vie ».

    Depuis quelques années, l’équipedu CTV propose un programme de ressourcement en 12 semaines, appelé R-12, destiné à des religieuses, religieux et prêtres diocésains. L’objectif est d’aider les participants à évaluer leur propre vie sous tous les aspects : humain, psychologique, théologique, spirituel, apostolique, pastoral, communautaire. Des animateurs et animatrices compétents et expérimentés les accompagnent pendant les trois mois. Il s’agit d’une expérience communautaire qui se fait dans un environnement africain et la majorité des animateurs et animatrices sont des Africains, ce qui devrait conduire à un ressourcement qui colle à la vie concrète de chaque participant. Beaucoup font de cette période d’arrêt et de recul un temps d’action de grâce pour la bonté et la présence de Dieu dans leur vie.

    D’autres la vivent comme un temps de guérison de blessures intérieures, un temps pour un nouveau départ. A la fin de la session les participants se rendent compte qu’ils viennent de prendre un nouvel élan pour une vie plus belle et plus épanouie, sous le regard de l’amour de Dieu. Une deuxième session, appelée R-6, qui en est déjà à sa 14e édition, est destinée à des hommes et des femmes appelés à un ministère de formation initiale dans l’Institut de vie consacrée auquel ils appartiennent. Six semaines, c’est peu.

    Même dans une situation de précarité, il est nécessaire de faire ce qui est possible pour se préparer à cette tâche, car il s’agit de la vocation et de l’avenir de jeunes gens qui répondent généreusement  à un appel de Dieu. Nous savons que c’est Dieu qui est le premier et principal formateur des cœurs,mais il n’agit pas dans le vide.

    Sa sollicitude pour ceux qu’il appelle à suivre son Fils de façon radicale, passe par d’autres personnes, des aînés. Ceux-ci désirent accomplir cette mission avec compétence, avec confiance et dans un esprit de foi. Il s’agit donc d’une tâche de collaboration avec Dieu luimême. C’est donc plutôt une initiation au ministère de formateur ou formatrice. Cette initiation se veut surtout pratique, intégrée, proche des réalités du monde africain.

    Les derniers temps, l’équipe du Centre a été sollicitée aussi par des supérieures religieuses pour demander un temps de formation intense comme préparation aux vœux perpétuels de leurs jeunes Sœurs. C’est ainsi que nous proposons cette année une première session de six semaines afin de répondre à ces demandes. Le programme consiste en trois volets. Le premier veut amener les religieuses à une connaissance de soi plus profonde.

    Le deuxième volet veut les aider à approfondir la connaissance et la pratique de leur vie religieuse, en réfléchissant sur les trois vœux et la vie communautaire. Le dernier volet les aidera à mieux comprendre leur mission dans l’Eglise et dans le monde, en tant que religieuses, et à s’y engager avec enthousiasme.

    L’ensemble du programme veut inviter les participantes à faire une relecture de leur vie religieuse en vue d’un engagement définitif en connaissance de cause, qui doit être une réponse de tout leur être à l’appel d’amour du Seigneur. La méthode est active et participative. Les intervenants introduiront les thèmes et inviteront les participantes à un travail en petit groupe, qui sera suivi par une mise en commun et des échanges supplémentaires. Un accompagnement personnel est prévu et est fort conseillé, afin que les participantes puissent approfondir et intégrer la matière reçue, éprouver leurs motivations et enraciner davantage leur vie religieuse en Christ.

    Le CTV veut être un instrument au service de l’Eglise locale de la République du Congo en particulier, et de l’Afrique francophone en général ; au service des prêtres diocésains, des religieux et religieuses, toujours dans une perspective missionnaire.

    Un ministère d’animation, de formation et d’accompagnement exige un esprit et une attitude d’accueil et d’écoute. Dire à tous ceux qui viennent vers nous, comme Jésus disait à ses disciples qui revenaient de leur mission : « Venez vous-mêmes à l’écart, dans un endroit désert, et reposez-vous un peu » (Mc 6,31). Oui, après plusieurs années d’engagement, chaque personne consacrée ressent le besoin de s’arrêter, de profiter d’un temps de ressourcement, indispensable pour la santé physique, psychologique et spirituelle. Notre ministère consiste à s’asseoir au bord du puits, comme Jésus avec la Samaritaine et écouter l’histoire de leur vie. Rejoindre des pèlerins sur la route, parfois découragés, fatigués, déçus et frustrés par les coups de la vie, et faire avec eux un bout de chemin, comme Jésus faisait avec les disciples d’Emmaüs, afin qu’ils puissent continuer la route, le cœur brûlant.

    Ou encore, écouter dans le silence du soir des chercheurs de Dieu, comme Jésus accueillait Nicodème. Accueillir et écouter tous avec bienveillance, sans juger ou condamner. Les inviter à la confiance en Dieu qui connaît les cœurs et accueille chacun tel qu’il est, avec ses joies, ses peines et échecs, avec ses talents et ses limites. Le cas échéant, dire une parole de pardon, de miséricorde, de guérison à ceux qui se sont égarés quelque peu, comme Jésus disait à la femme adultère : « Moi non plus, je ne te condamne pas. Va, désormais ne pèche plus » (Jn 8,11). Enfin, les inviter à se laisser poser la question essentielle que Jésus a posée à Simon Pierre : « Simon, fils de Jean, m’aimestu ? » Une question qui peut alors susciter une nouvelle réponse, généreuse, humble mais enthousiaste : « Oui Seigneur, tu sais tout, tu sais que je t’aime » (cfr Jn 21,15 …17). A ce moment, ils entendront de nouveau l’appel du début : « Suis-moi ». Et avec le Seigneur ressuscité, présent au cœur de leur vie, ils peuvent aller loin, très loin.

    Accueillir, s’asseoir, écouter, encourager, redonner confiance, ouvrir des horizons, être dans la joie avec ceux qui se réjouissent, partager les peines de ceux qui pleurent, affermir ceux qui doutent : n’est-ce pas cela que Jésus a fait ? En effet, chaque personne qui l’avait rencontré, reprenait sa route, transformée, renouvelée. Ainsi, nous essayons d’être missionnaires à la manière de Jésus.

    Le jour où les participants, le cœur en joie, ‘descendent de la montagne’, quittent l’oasis de silence et de paix du CTVMbudi, et reprennent la route vers leur champ de mission, nos cœurs sont habités de sentiments d’action de grâce pour l’œuvre que le Seigneur a réalisée. Nous les accompagnons avec nos prières et nous faisons nôtres les paroles de S. Paul : « Je rends grâces à mon Dieu chaque fois que je fais mémoire de vous, en tout temps dans toutes mes prières pour vous tous. … Dieu m’est témoin que je vous aime tous tendrement dans le cœur du Christ Jésus. … Que votre charité croissant toujours de plus en plus s’épanche en cette vraie science et ce tact affiné qui vous donneront de discerner le meilleur » (Ph 1, 3 … 10)

    Saint Louis University (1911-2011). Cent ans de mission ad extra dans l’enseignement: un héritage

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    Jessie M HechanovaPar Jessie M. Hechanova, cicm

    INTRODUCTION

    Dans sa remarquable circulaire Les missions du Cœur Immaculé de Marie: Un centenaire (1862-1962) pour commémorer le centenaire de CICM, le supérieur général Omer Degryse décrit les Missions aux Philippines comme une partie intégrante des cent ans de la congrégation CICM. En plus, il affirme qu’aux Philippines la “Saint Louis University à Baguio est le couronnement de l’apostolat scolaire”. Dans l’histoire de la mission CICM aux Philippines, Saint Louis University (SLU) est vraiment une importante contribution de CICM au développement du peuple des Cordillères pour ce qui concerne un enseignement de qualité et une formation humaine chrétienne.

    IMPORTANCE HISTORIQUE

    Les pionniers CICM aux Philippines ont commencé et complété leur travail d’évangélisation par le biais de l’enseignement. Quand ils sont arrivés dans les régions montagneuses des Philippines en 1907, leur principale stratégie missionnaire consistait à construire des églises et à ouvrir des écoles dans les communautés locales qu’ils desservaient. Leur principe directeur était “une mission pour transformer”. Cela veut dire que la présence CICM envisageait surtout une transformation. CICM voulait changer systématiquement, par le biais de l’enseignement, les valeurs de la société pour qu’elles soient conformes aux principes de l’Évangile. 

    Appelés à la conversion, les missionnaires CICM se sont constamment efforcés d’améliorer leurs modes de vie en fonction des besoins de leurs communautés, pour devenir ainsi des témoins efficaces de l’Évangile. Les missionnaires CICM ont toujours considéré l’apostolat scolaire comme un important lieu missionnaire de transformation intégrale. SLU en tant qu’institution CICM et est devenue une université au début de 1963 avec des recteurs et des présidents CICM compétents. Depuis lors SLU a continué à évoluer en un important centre d’éducation aux Philippines.
     
    SLU AUJOURD’HUI

    Pour accomplir sa mission de transformer la société par le biais de l’enseignement comme l’ont fait les premiers missionnaires CICM, SLU continue à revitaliser sa vocation missionnaire en étendant son influence institutionnelle à l’aide de programmes académiques aux normes internationales. 

    SLU est la première institution d’enseignement supérieur CICM aux Philippines. C’est la plus grande université au nord de la capitale des Philippines et une des plus grandes du pays. SLU compte environ 27.000 étudiants pour l’enseignement supérieur dans ses quatre principaux campus, qui sont très bien situés sur son terrain de douze hectares. SLU fait preuve d’une excellence académique indubitable avec entretient cet missionnaire.
     
    SLU tomorrow

    Héritage

    L’héritage de SLU comme école CICM peut être apprécié à sa juste valeur quand elle est vue dans le contexte d’un remarquable siècle de service missionnaire à la population des régions montagneuses du nord des Philippines. Pendant les cent dernières années, elle a joué un rôle essentiel dans le développement socioculturel et la formation chrétienne des peuples de la Cordillère. 

    Fondée comme une petite école de mission en 1911 par le Père Séraphin Devesse, l’humble curé de Baguio, et établie comme collège par Mgr William Brasseur et Raphaël Desmedt en 1952, elle a grandi des programmes pédagogiques qui reçoivent le meilleur degré d’accréditation du pays. Évaluée selon les normes internationales pour la qualité de la recherche et de l’enseignement, SLU compte parmi les deux cents meilleures universités d’Asie d’après le QS (Quacquarelli SymondsWorld University Rankings

    Le caractère multiculturel et international de SLU comme établissement d’enseignement supérieur de CICM, pour lequel il a toujours été apprécié, est essentiellement en accord avec l’orientation ad extra de CICM. L’enseignement offert selon les critères de la mission ad extra modifie les méthodes que la société emploie aujourd’hui pour définir et assurer l’éducation. La mission de l’enseignement ad extra envisagé et appliqué par les écoles CICM comme SLU peut offrir un nouveau paradigme pour que l’éducation vise enfin le bien commun. 

    Poursuivre le bien commun est en fait un devoir ad extra. Il suppose, d’abord et avant tout, une compréhension globale de ce que signifie vivre dans le respect mutuel. Il implique aussi la volonté de transcender ses propres intérêts et par conséquent de se soucier du bien-être de l’autre. La mission ad extra est une orientation sociale pour aller vers l’autre qui est dans le besoin. C’est la catholicité en action! Dans une perspective pédagogique, elle implique l’élaboration d’autres outils pédagogiques, suffisamment universels et inclusifs, pour que les études soient intéressantes pour tous les étudiants. On peut dire que SLU a toujours fonctionné en vue de cet objectif. 

    En effet, SLU s’efforce d’assurer un environnement académique global, où les étudiants de différents milieux culturels, de divers pays étrangers et de diverses croyances religieuses peuvent entrer en dialogue et apprendre les uns des autres. L’université continue aussi à attirer des étudiants et des experts du monde entier. La présence de ces différents groupes ethniques et sociaux dans le campus transforme SLU en un centre de mission permanent où CICM peut prêcher la Bonne Nouvelle! 

    Ainsi, en partant de l’actuel paradigme pédagogique individualiste, consumériste et exclusiviste de la société, un enseignement missionnaire comme celui assuré par SLU peut susciter une éducation d’inspiration évangélique pour ce qui concerne la justice sociale, les droits de l’homme et la préservation de l’environnement en vue d’un avenir viable. 

    En plus de l’excellente formation académique que SLU offre à la population de la Cordillère, elle n’a pas manqué d’assumer sa responsabilité pastorale en tant qu’établissement missionnaire d’enseignement supérieur. Fidèle à son identité CICM, SLU est mandatée par CICM, par l’Église et par Dieu pour être un instrument et une source d’espoir pour les secteurs marginalisés de la société. Puisque SLU offre une éducation ayant une perspective chrétienne, il incombe à sa mission pédagogique d’ouvrir la voie vers la construction du Royaume de Dieu parmi les pauvres. 

    Dédiée à la promotion du bien-être des membres les plus vulnérables de la société, SLU en tant qu’université CICM dispose de plusieurs instituts de pastorale qui fonctionnent comme instances auxiliaires du bureau du président. Fidèle à son mandat CICM ratifié de “s’occuper des enfants abandonnés”, SLU a, entre autres: 1) le Sunflower Children’s Center, qui offre une aide psychothérapeutique et une évaluation psychologique pour des enfants ayant des besoins spéciaux; 2) le SLU Sunflower Centennial Halfway Home for Boys, qui offre un refuge protecteur à des garçons victimes d’abus ou de négligence, et, 3) l’Institute for Inclusive Education Foundation, qui s’occupe des étudiants souffrant de déficiences visuelles. 

    SLU DEMAIN 

    SLU – un remarquable institut d’enseignement de CICM aux Philippines qui, comme la “Lumière du Nord”, est chargé de la mission de transformer la société – veut continuer à être un apostolat spécialisé de CICM. Grâce à un enseignement inclusif elle soutient le principal objectif missionnaire de l’évangélisation au service des étudiants autochtones et des étudiants étrangers de toutes les cultures. L’apostolat scolaire est donc une priorité missionnaire pour CICM, puisque l’évangélisation et l’éducation sont inextricables, inséparables. L’enseignement dans une perspective chrétienne et missionnaire implique la proclamation efficace de l’Évangile de Jésus- Christ dans une société en pleine évolution, au-delà des limites géographiques et culturelles. 

    Par conséquent, vu à la lumière du message salvifique du Seigneur, l’enseignement vise à la croissance intégrale de la société en vue de la réalisation du Royaume de Dieu parmi nous, où chaque être humain est accepté et peut profiter de la plénitude de vie. En d’autres mots, l’enseignement CICM à SLU est finalement sotériologique puisqu’il veut réaliser le salut en harmonisant l’évangélisation et l’enseignement. 

    CONCLUSION 

    Fidèle à la vocation CICM de conversion, SLU doit prendre à cœur sa propre conversion institutionnelle comme une condition indispensable pour la transformation. La transformation globale est en fait une tâche de conversion, de changement du cœur, qui purifie les anciennes habitudes d’autosatisfaction et d’indifférence aux choses nouvelles. Bref, au cœur de la transformation de SLU il y a un esprit de renouvellement qui l’anime pour se transformer elle-même ainsi que la société qu’elle est appelée à servir. Je le répète: avant que SLU puisse rêver de transformer la société autour d’elle il lui incombe le devoir concomitant de se transformer pour devenir vraiment un instrument de transformation pour les autres. 

    En plus des statistiques, la présence missionnaire soutenue de SLU pendant un siècle témoigne inévitablement de l’important impact qu’elle a eu pour le développement des peuples de la Cordillère. Elle leur a donné un autre mode devie qui est inspiré par la vie et le message de Jésus-Christ. Elle leur a enseigné la compassion et le service à la société. Enfin, elle a façonné la jeunesse qui est confiée à ses soins en vue d’une formation humaine holistique selon les valeurs de l’évangile. 

    CICM a été fondée il y a cent cinquante ans avant tout pour prêcher la bonne nouvelle, pour établir des communautés chrétiennes et prendre soin des enfants abandonnés et des marginaux. Aujourd’hui, SLU en tant qu’université CICM entretient cette mission CICM ad extra en offrant une éducation de qualité qui inclut au lieu d’exclure. Elle s’unit à toutes les autres entités pastorales de CICM à travers le monde pour célébrer le cent cinquantième anniversaire de la fondation de la congrégation, et elle renouvelle son engagement d’être fidèle au Seigneur Jésus Christ, le premier missionnaire et maître, qui dit à ses disciples: “Comme le Père m’a envoyé, moi aussi je vous envoie” (Jean 20: 21)

    « Afin que les petits comprennent »

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    Herman De VriendtPar Father Herman De Vriendt, cicm

    Dès mon arrivée au Sénégal en novembre 1986, j’ai senti que, pour être à mon aise « dans la maison de mon Père » (l’Eglise et la société sénégalaise), je devrais bien apprendre la langue Wolof, sinon je resterais devant la porte de cette ‘maison’. M’appuyant sur l’article 13.2 de nos Constitutions qui dit «L’intégration exige que nous connaissons la langue de ceux au service desquels nous nous sommes mis », j”ai cherché ensemble avec les confrères un professeur. Nous l’avons trouvé au Centre de LinguistiqueAppliquée de Dakar (Université de Dakar), dans la personne de Monsieur Jean Léopold Diouf, chercheur en Wolof. Il m’a aidé dans mes premiers balbutiements jusqu’à devenir notre expert attitré.

    Le Wolof est la première langue nationale du Sénégal. Malgré le fait que seulement 40 % de la population est de l’ethnie wolof, au moins 85 % de la population parle cette langue.

     Après avoir travaillé à deux, moi même et Monsieur Diouf, nous avons vu qu’un groupe de secrétaires’ Wolof, pourrait augmenter le rendement du travail. C’est ainsi qu’en décembre 1990, nous avons fondé ensemble avec quelques jeunes de la paroisse de Diamaguène un groupe de travail. Monsieur Diouf les a ‘alphabétisés en Wolof, langue qu’ils parlaient bien mais qu’ils ne savaient ni écrire ni décrire c.-à-d. en expliquer ses structures linguistiques.

     Peu après ce groupe de travail a reçu le nom de Projet Wolof Diisoo (PWD). ‘Diisoo’ est un mot Wolof qui veut dire « concerter, concertation » : nous voudrions travailler en nous concertant régulièrement.

    Que je me sente à mon aise dans la maison de mon Père » est une motivation forte pour apprendre la langue du peuple vers lequel je suis envoyé. Mais plus important que mon sentiment est le peuple qui m’accueille, surtout les petits’, ceux qui n’ont pas eu la chance d’étudier et d’apprendre d’autres langues. C’est ainsi que la devise de notre Projet Wolof est devenue « Afin que les petits comprennent ! ».

    Dans le respect pour le patrimoine culturel du peuple sénégalais, le Projet Wolof Diisoo, dès le début de son existence (1990), s’est attelé à la promotion de cette langue par la traduction des textes en Wolof. Ainsi il a donné l’occasion aux sénégalais de lire et de se conscientiser non à partir d’une langue étrangère mais par le biais d’une langue qui est propre au terroir.

    Avec le Pape Jean-Paul II dans son discours à l’Assemblée générale des Nations Unies pour la célébration du 50ème anniversaire de sa fondation (5 octobre 1995), nous disons : « La nation possède un ‘droit fondamental à l’existence’, à ‘garder sa propre langue et sa culture, par lesquelles un peuple exprime et défend ce que j’appellerai sa ‘souveraineté spirituelle’. »

    Avec le groupe du Projet Wolof, nous avons travaillé et travaillons encore à la traduction et la révision (retraduction et réécriture dans l’orthographe reconnu par un décret officiel) des textes bibliques, liturgiques, catéchétiques et pastoraux. Les anciens missionnaires avaient fait un travail remarquable. Mais la langue évolue. De là la nécessité d’une refonte des textes. En plus, les défis pastoraux et catéchétiques d’aujourd’hui ne sont plus ceux d’il y a trente ans.

    Après quelques années d’existence, nous nous sommes engagés aussi dans l’alphabétisation dans plusieurs centres de Formation Féminine. Ceci pour aller à la rencontre des jeunes femmes qui n’avaient pas eu l’occasion d’aller régulièrement à l’école. « À la recherche des petites, afin qu’elles comprennent ! »

    Dans la même lancée, le Projet Wolof a organisé depuis des années des cours de base de Wolof pour étrangers : des missionnaires et des coopérants y suivent un cours de base de trois mois (décembre, janvier et février).

    Nous constatons que les sollicitations auprès du Projet Wolof Diisoo pour une intervention (orale ou écrite) augmentent d’année en année. Depuis quatre ans, la Nonciature Apostolique nous demande, au nom du ConseilPontifical pour le dialogue interreligieux, de traduire le Message aux Musulmans pour la fin du Ramadan. Nous sommes sollicités pour la préparation des textes liturgiques à l’occasion des événements ecclésiaux diocésains ou nationaux (pèlerinage, ordinations, jubilé etc.). En vue des Élections présidentielles (26 février 2012) plusieurs demandes de traduction sont arrivées sur notre bureau : le message à la Nation à l’occasion de Nouvel An de l'archevêque de Dakar, le Cardinal Théodore Adrien Sarr, le message de la Conférence Épiscopale et des interventions de la Commission Épiscopale de Justice et Paix pour accompagner les citoyens sénégalais dans la préparation de ces élections.

    Et depuis trois ans et demi, le Projet Wolof Diisoo, s’est lancé dans des émissions télévisées. Nous, un groupe de dix personnes, assurons deux fois par mois (le deuxième et le quatrième dimanche) une émission de 55 minutes, sous le nom de « Laudemus Dominum », à la RDV (= Radio Dunyaa Vision), entièrement en Wolof.

    Cette émission en Wolof est intégralement conçue, préparée et réalisée par le Projet : rédiger les textes, les distribuer aux différents présentateurs et présentatrices et les répéter avec eux ; l’enregistrement, le montage, le rendu en film et la gravure d’un DVD, qui, finalement, est déposé à la Radiotélévision RDV comme un produit fini. Nous fonctionnons comme une « maison de production extérieure ».

    Signalons également que bien que le Wolof parlé est omniprésent dans la société, la langue écrite ne l’est pas. C’est pourquoi nos émissions sont accompagnées des sous-titrages en Wolof : une sorte d’alphabétisation à grande échelle.

    A côté du choix de la forme (le Wolof comme langue de communication), notre émission ‘Laudemus Dominum’ veut aussi promouvoir la cause de la justice et de la paix par son contenu. Ce contenu se répartit en trois volets. Dans la première partie, nous présentons une Parole de la liturgie dominicale (2‘mG lecture, qui n’est pas toujours développée dans les homélies).

    Dans la deuxième partie, nous expliquons la doctrine sociale partir de l’encyclique de Benoît XVI ‘Caritas in veritate’, où il prend la défense des pauvres, accuse le capitalisme illimité, et plaide pour le respect de l’environnement afin de sauvegarder notre planète ‘Terre’.

    Dans la troisième partie, sous le titre « Démb ak tey » (pour dire en Wolof pour « Hier et aujourd’hui »), nous présentons une actualité, juste passée ou à venir. A côté des événements de l’Église locale, cette partie nous donne l’opportunité de présenter dans plusieurs émissions par exemple «Africae Munus », l’exhortation post-synodale sur l’Église en Afrique.

    Est-ce que notre message atteint « les petits » ? Difficile à évaluer avec des sondages sophistiqués comme en Europe. Mais de bouche en bouche, nous apprenons régulièrement quelque chose. A titre d’exemple. Lors d’un exercice de reportage pendant la session de formation annuaire des communicateurs catholiques à Ziguinchor (Casamance- Sénégal) participants étaient envoyés dans un village en brousse. Tout à coup, une femme du village reconnaissait une de nos présentatrices de ‘Laudemus Dominum’ en Wolof, et appelait ses copines. Dans un clin d’œil notre présentatrice était entourée d’un groupe de femmes, qui commençaient à chanter en Wolof : « RDV moo ko yor », ce qui veut dire : « Radio Dunyaa Vision est à la tête ». Le pourquoi de cette qualification était l’emploi exclusif du Wolof.

    Sortant du Commissariat de la Police des Étrangers, où j’avais renouvelé ma carte de séjour pour 2011, une femme me reconnaît et me dit : « Monsieur, je vous reconnais : c’est vous qui faîtes des émissions en Wolof. Je suis musulmane, mais cela ne m’empêche pas de suivre vos missions catholiques. »

    Selon nos Constitutions, nous sommes dédiés au Verbe Incarné. Article 12 cite la lettre aux Philippiens 2, 6 – 7 : « Jésus Christ s’est dépouillé, prenant la condition de serviteur, devenant semblable aux hommes » : il est venu afin que nous comprenions. La langue est la porte royale pour entrer « dans la maison de notre Père » et y rencontrer le peuple vers lequel nous sommes envoyés, surtout les petits.

    Vivre en Communauté

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    Jan ReynebeauPar Jan Reynebeau, cicm

    Vivre en communauté peut être une bénédiction, ou un enfer; parfois un purgatoire. La vie commune ne laisse personne indifférent. Mais elle peut parfois tourner à la froideur. Cela arrive quand la chaleur disparaît. Et cela n’arrive que rarement d’un seul coup. Vivre ensemble, cela se fait à partir de la diversité. Chacun a son tempérament et sa sensibilité, ses préférences et ses aversions. Et cela provoque souvent chez l’autre personne une réaction de sympathie, d’antipathie ou de nervosité. Ces sentiments nous tombent dessus. Nous ne les choisissons pas nous-mêmes. La question est alors: qu’allons-nous en faire? Nous avons certes la liberté d’en disposer.

    Vivre ensemble n’est pas toujours facile. Nulle part. Pas même dans une famille exemplaire, encore moins dans la société. Nous vivons en frères les uns avec les autres. Godfried Bomans a écrit: “Les hommes sont nos frères. Mais on se lasse parfois de cette famille”. C’est exact. On n’a pas la même affinité avec tous ses frères. De plus, en tant que religieux, nous avons souvent cultivé une image idéale. Et si la réalité n’y correspond pas, nous réagissons de manière critique. Si cette critique n’est pas entendue et qu’elle n’est pas immédiatement suivie d’effet, nous nous glissons dans notre coquille.

    Cette coquille est comme un cocon sûr, où les désirs non réalisés et les sentiments sans réponse ne cessent de bouillonner. Si cela arrive souvent, et se produit chez plus d’un, et persiste, la dynamique dans une communauté devient une spirale descendante. Cela ne réjouit personne.

    Du poil à gratter

    Cela semble passablement négatif. Heureusement, nos communautés sont de bonnes communautés. Mais, même les communautés bonnes au départ ne sont pas immunisées contre des infections latentes. Celles-ci commencent avec des symptômes à première vue innocents: quelqu’un ne vient plus à table ou au potus; un autre s’enferme toute la journée dans sa chambre; à une table de quatre ou six personnes on ne dit plus un mot; de deux tables presque vides on aurait facilement pu en faire une seule; d’autres sont constamment absents sans laisser d’information aucune. Ce n’est pas un drame si cela arrive de temps en temps. Il n’est pas nécessaire de bavarder et de papoter tout le temps ; il ne faut pas que “j’aime” toujours, et je peux à l’occasion passer une journée seul avec moi-même. Et il m’est certes permis d’envoyer quelquefois tout le monde se promener, ou au diable.

    Ce n’est que si ces ‘quelquefois’ deviennent une ‘habitude’ qu’on peut se demander si cela favorise la qualité de notre vie commune. Et si nous devrions tout simplement laisser les choses se passer comme ça, serait-ce donc la seule respon- sabilité du recteur? Ou sommes- nous mutuellement responsables les uns des autres?

    Être responsable signifie répondre à la demande et à l’attente des autres de se retrouver bien ensemble.

    Des paroles comme intimité, vie privée, liberté et justice, sont ici des concepts précieux, à moins qu’elles ne soient invariablement précédées de l’adjectif inflexible ‘mon, ma’. Dans ce cas, une réponse devient une anti-parole. Ainsi, toute communication est bâillonnée.

    Il se fait que la communication est précisément ce autour duquel tout gravite dans une vie en commun. Les bonnes communautés sont des communautés où les confrères se parlent. Et cela regarde plus que de simples appareils auditifs. Quelqu’un a dit: “Je suis bien ici, mais j’ai besoin de pouvoir parler avec quelqu’un de quelque chose de sérieux. C’est ce que je ne trouve pas ici”. Un autre: “Nous sommes tous frères les uns des autres, mais en fait nous ne nous connaissons pas”. Un autre, encore, ne revit que lorsqu’on parle de ‘la mission’, car ce qui déborde du cœur.

    Ouverture, communication et histoires de vie

    Les trois points auxquels nous devons porter une attention parti- culière dans nos communautés sont: ouverture, communication et histoires de vie. Nous les considé- rons rapidement à tour de rôle. Ouverture à ce qui se passe dans le monde proche et lointain, de choses bonnes et moins bonnes. Mais également ouverture réci- proque, aux joies et peines d’un chacun, et à ce qui intéresse les autres.

    Cette ouverture nous donne l’occasion d’en dire quelque chose entre nous (communication). Ça peut être grave, mais ce n’est pas toujours requis. En se parlant, on apprend à se connaître. La parole et la réponse créent de l'animation.

    Enfin, les histoires de vie sont une façon idéale de laisser le passé et le présent se fondre. Aujourd’hui, beaucoup d’entre nous sont âgés et épuisés. Ce n’est là qu’une partie limitée de la vie d’une personne. La partie la plus importante se déroule dans le passé. Partant, pouvoir raconter celle-ci complète l’image de qui je suis réellement. C’est ainsi que je veux être connu en tant qu’être humain, dès aujourd’hui, et pas seulement lors de mes obsèques. On pourrait peut- être à l’occasion en parler entre nous. ■


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